[1], Connard ! T1
EAN13
9782352870029
ISBN
978-2-35287-002-9
Éditeur
Archipoche
Date de publication
Collection
Romans français
Séries
Connard ! ([1])
Nombre de pages
200
Dimensions
17,8 x 11 cm
Poids
136 g
Langue
français
Code dewey
843
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Montréal, Québec, H3N 1W3.

eISBN 978-2-3528-7516-1

Copyright © L'Archipel, 2005.

À Hélène, Claire, Ariane et Marie,
mes morues bien-aimées.

Préface

Au début, la surprise. Ce que je sais d'Arièle Butaux, son apparence claire, sa personnalité délicate et sa culture, rien dans cette femme ne pouvait me la laisser penser capable de prononcer, encore moins d'écrire le mot : « Connard ! »

Ne vous y méprenez pas. Le paradoxe entre l'apparence « bien élevée » de l'auteur et la grossièreté du mot n'est pas gratuit. Ça n'a rien de la provocation imbécile de ces jeunes femmes qui se prennent pour Céline sous prétexte qu'elles décrivent avec une complaisance racoleuse des scènes violentes ou pornographiques.

Arièle Butaux a écrit « connard ». Pas « viandes ». Mais elle n'a rien non plus de ces écrivaines qui mazarinent leurs états d'âme convenus dans un style appliqué d'hypokhâgneuse.

Alors, me demanderez-vous, c'est quel genre de littérature, Arièle Butaux ?

Un peu bêtement, je vous répondrai que je n'en sais rien. La seule certitude, c'est qu'on se sent bien dans ce livre. Comme dans les films de Sautet, on s'installe et on est bien, on rit et on pleure avec les personnages. Lors de la visite à une ex-belle-mère, on ressent le même creux au cœur que l'héroïne en s'apercevant que Mamie a fait disparaître le cadre avec la photo du mariage au-dessus du piano. Et on a envie de pleurer en s'apercevant qu'une autre a continué à lui offrir les boîtes à pilules dont elle fait collection.

Et puis cette façon de parler des hommes. Un peu comme si Arièle portait ces lunettes dont on rêvait lorsqu'on était enfant, vous savez, ces lunettes avec des rayons magiques qui vous permettent de voir sous les vêtements... Eh bien! non seulement Arièle voit sous les vêtements des hommes, mais elle entend aussi sous nos « voix étudiées » nos « sous-entendus creux ». Enfin, elle connaît nos pensées, elle sait ôter délicatement nos voiles de séduction pour faire apparaître, en pleine lumière, le connard qui bande en chacun de nous.

Guy CARLIER
Argenteuil1, avril 2005

1. Oui, j'ai précisé « Argenteuil », en hommage ironique et grimaçant aux auteurs ampoulés, boursouflés, à ceux du train du foie gras de la Foire du livre de Brive, qui ne sont pas des écrivains mais des comptables, à tous ceux qui dormessonnent, qui jardinent, qui sabatiérisent, repus et satisfaits, aux profs de français frustrés, à ceux qui racontent leur misérable existence comme on passe chez Delarue, tandis que des efflanqués du cœur ou du corps attendent en tremblant le facteur et cette putain de lettre de Gallimard ou d'Albin Michel. Bref, « Argenteuil » pour ennuyer les connards.

1

Une robe de mariée

« Nettoyage à domicile. Travail soigné. Tarifs blanchisserie... » Vingt fois que je relis ces mots peints sur la vitrine. J'ai bien un livre dans mon sac à main, mais je n'aime pas lire debout. Je pourrais revenir plus tard, lorsqu'il y aura moins de monde. Mais le flux humain est imprévisible et si je pars maintenant, j'aurai à jamais perdu les dix minutes déjà passées à attendre. Il faudrait être capable de se décider très vite : garer sa voiture, arriver devant le pressing, estimer d'un coup d'œil la durée de l'attente et faire demi-tour. Or je ne suis pas rapide, j'hésite, je tergiverse et je me retrouve coincée derrière la nuque épaisse d'un monsieur à pellicules, tandis que ma robe de mariée flotte, irréelle, au-dessus de l'employée en blouse rose.

Il manque un bouton, un malheureux égaré sur la trentaine rangée tout le long du dos comme un chapelet de dents de lait. Il a dû tomber au nettoyage. Bon, je ne vais pas en faire un drame, de toute façon je ne remettrai pas ma robe demain matin. Ni jamais, d'ailleurs. Absurde, quand on y pense, de dépenser cent euros pour rendre sa fraîcheur virginale à ma défroque d'épousée. J'aurais aussi bien pu la jeter depuis le pont des Arts, regarder le jupon s'ouvrir en parachute, le courant emporter l'organdi jusqu'à ce que la blancheur du tissu se confonde avec les vaguelettes. Mais voilà, je suis aussi peu romantique que résolue, deux atrophies du cerveau auxquelles je dois de respirer cette odeur suffocante de pressing en attendant que l'on me rende une robe immettable qui va envahir la moitié de ma penderie.

Une dame dont je ne vois que les orteils peints et les épaules sciées par les bretelles d'un soutien-gorge s'appuie sur le comptoir, délimite un territoire dans lequel il n'y en a provisoirement que pour elle. Peau sèche, varices en plan de métro, chairs vaincues par la pesanteur, l'été tombe sur cette femme avec son cortège de petites horreurs. L'employée lui pose sur le bras un plastique qui accroche à la peau et protège un tailleur saumon, cette couleur déprimante de petit-four et de glaïeul dont ma mère avait affublé les demoiselles d'honneur. Rosalie, Solenn, Lucie portant mon voile, pressées dans mon dos comme une grappe écœurante de sucre et de crème fouettée. Toute la noce évoquait le palais de dame Tartine. François lui-même avait l'air d'une motte de beurre prête à fondre pour mes beaux yeux.

En vérité, c'est moi qui ai failli fondre en larmes lorsque son « oui » a fait de lui mon époux.

Difficile à dire, ce « oui ». On l'a tellement entendu au cinéma, à la télévision, lu dans les livres qui finissent bien qu'on a du mal à lui donner une couleur personnelle. Doit-on le murmurer en baissant les yeux, le faire vibrer clair en regardant l'élu en face, marquer un temps de réflexion pendant lequel l'église entière fait semblant de croire au suspense ? À moins d'être acteur de métier, on ne pourra jamais empêcher ce « oui » galvaudé de sonner un peu faux.

Il fait chaud, mes jambes sont lourdes et le monsieur à pellicules a des auréoles sous les bras. La dame aux orteils en technicolor lève le camp après avoir compté deux fois sa monnaie. Encore une qui est passée à l'euro avant d'avoir compris que plus personne ne parle en anciens francs.

Un jeune homme en bermuda tend son ticket. Si seulement il avait la bonne idée de réclamer un pantalon ! Je déteste les mollets poilus des hommes. François, lui, n'a pas un poil sur le corps. Il a une peau douce et blanche de jeune fille élevée sous cloche. L'amour est question d'épiderme, je confirme !

J'ai fait des jalouses en épousant François et sans doute aussi quelques malheureuses. Sophie avait du mal à sourire, ses vœux de bonheur lui arrachaient la bouche. Caroline a passé la soirée à rire trop fort, en fille qui dit ne pas croire à l'amour mais demande chaque soir au petit Jésus de lui envoyer un seigneur et maître dans les plus brefs délais. Quant à Morgane, elle a dansé avec mon cher et tendre un slow qui ressemblait à celui de la dernière chance.

Le jeune homme n'est pas près de quitter son bermuda : l'employée lui emballe une combinaison de soie blanche, très sexy avec sa dentelle et ses rubans. Il doit être très intime avec la propriétaire de la nuisette. Je l'aurais plutôt imaginé avec une grande fille aux fesses larges, aimant la marche en montagne avec un sac à dos et des baskets odorantes, le soir, dans le dortoir du gîte. On se fait tant d'idées sur les gens ! Hier, j'ai vu à Monoprix un monsieur très vilain et plus tout jeune qui payait sans complexe plusieurs paquets de préservatifs. Les moches aussi ont leurs petits bonheurs. Mais tout de même, une fille en nuisette avec un type en bermuda...

Sous ma robe de mariée, j'avais la panoplie complète dont rêvent tous les jeunes mâles normalement constitués : bas, porte-jarretelles, lingerie fine. Il n'a même pas remarqué ! Dès le lendemain du mariage, je suis revenue à une solution économique et confortable : mes culottes Petit-Bateau. Là non plus, au...
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