Le chantier, roman

Mo Yan

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    23 novembre 2011

    Après avoir délaissé pendant quelques temps mon tour d’horizon des auteurs chinois, l’occasion m’a été donnée de découvrir la plume d’un nouvel auteur, très prolifique et reconnu en Chine, Mo Yan.

    Œuvre plutôt courte (un peu plus de 200 pages) qui m’a permis de me frotter au style de l’auteur, « Le chantier » est un roman brut, d’un réalisme choquant qui mélange un certain comique de situation à des passages d’une cruauté difficilement supportable. Mo Yan nous y raconte les vicissitudes d’un groupe d’ouvriers chinois à l’époque de la révolution culturelle. Leur chef les abandonnant pour retourner à la capitale, les ouvriers se retrouvent plus ou moins livrer à eux-mêmes. Chargés de construire une route au beau milieu de nulle part, les ouvriers finissent bien vite par s’ennuyer. En résulte que pour tromper leur ennui (et un estomac qui crie famine), ceux-ci seront poussés à certaines extrémités…

    Le point culminant où les choses commencent à déraper sérieusement, est le moment où les ouvriers prennent la décision - atroce - de manger le chien d’une villageoise. Coutume courante à l’époque en ce pays, mais qui est décrite ici avec tant de précisions et sur tant de paragraphes (plusieurs pages) que j’en ai presque eu la nausée (et que j’ai tout simplement repris au passage suivant). Quand on a lu le roman dans son ensemble, on saisit parfaitement où l’auteur voulait en venir avec la cruauté de cette description, mais il n’en reste pas moins que le roman est fort sinistre dans son ensemble. Mo Yan enchaine les chapitres qui se consacrent successivement à un des ouvriers du chantier. Au nombre de quatre, les protagonistes ont chacun un passé lourd, passé qui les a conduit sur ce chantier où ils travaillent sans toucher de salaire. Au cours d’analèpses, Mo Yan revient sur le passé des quatre hommes. Le seul pour qui j’ai ressenti un peu d’empathie étant Liu le cuisinier, qui ne méritait pas pareille fin.

    « Le chantier » est donc un récit sombre, âpre, qui décrit avec beaucoup de réalisme la nature sauvage de l’Homme. Preuve en est faite avec ce roman, que poussé sans retranchements, l’Homme est capable des pires folies. A l’aide d’une plume incisive et caustique, Mo Yan décrit la déchéance d’un groupe d’hommes livrés à eux-mêmes, jusqu’à sa toute fin d’une virulence éprouvée. A ne pas mettre entre toutes les mains.