• Conseillé par
    10 février 2014

    Nous sommes en Italie dans un futur proche. Le chaos règne, les frontières sont fermées, les institutions sont à la déroute comme l'ensemble du pays. Leonardo, écrivain et ancien professeur a vu sa carrière entachée par un scandale. Revenu dans son village d'enfance où on l'appelle toujours le professeur, il tente de se remettre à l'écriture entouré de ses livres. Il ne sait pas comment la situation a pu tourner de la sorte parce que sa vie personnelle s'effondrait. D'ailleurs, qui le sait vraiment. Là n'est pas la vraie question.
    Sans prévenir, son ancienne femme lui confie leur fille qu'il n'a pas vu depuis huit ans et le fils de son mari âgé de dix ans. Le temps pour elle de rejoindre la Suisse, juste une affaire de quelques jours. Leonardo découvre sa fille qui est devenue une adolescente de dix-sept ans.

    Mais les jours se transforment en semaines et Leonardo doit les protéger alors que la barbarie gagne le village. Des groupes de jeunes venus d'on ne sait où pillent, volent et tuent. La nourriture manque, le danger est omniprésent, Leonardo décide qu'il est temps pour eux de quitter l'Italie pour la France.
    Dans un monde post-apocalyptique devenu fou où la violence règne, rien ne se passe comme prévu. Le monde est encore plus féroce qu'il ne l'avait imaginé. Un cauchemar vivant peuplé de tortures et de cruauté. Leonardo refuse de s'abaisser à la sauvagerie, il puise sa force et des ressources insoupçonnées dans l'amour pour sa fille. Pour elle, il doit rester debout.
    On est projeté, valdingué au bord de ce précipice de haine, de décadence et d'horreurs. Et malgré des scènes très dures, il est impossible de lâcher ce livre. Repoussé dans nos retranchements, on s'accroche à des doses d'humanité qui persistent. On s'y accroche comme à un radeau de sauvetage en ayant peur. Et on assiste à la métamorphose de Leonardo, à sa prise de conscience. Aussi douloureuse soit-elle. Cet homme qui vivait dans son cocon en sortira grandi. Ce livre s'achève sur une note d'espoir minime mais source de vie et nous laisse sonné..
    Une lecture certes éprouvante mais passionnante, magnétique ! Davide Longo distille de magnifiques passages sur le rôle de la lecture et des livres comme pour contrer toute cette noirceur. Un uppercut !


  • Conseillé par (Libraire)
    26 mars 2013

    Une fable italienne apocalyptique

    Le génie italien est souvent dantesque et génial.

    Ce livre en est la parfaite illustration. Tant dans son écriture que dans l'histoire qu'il raconte.

    Est il prémonitoire de l'Italie de demain ? Espérons que la réponse sera NON !

    Un livre à lire, car il est le reflet des angoisses de notre devenir et une réflexion sur notre société.


  • 25 février 2013

    J'ai refermé ce livre depuis quelques heures et je reste sans voix...

    Je ne sais pas trouver les mots pour témoigner mon ressenti de lecture. Ma motivation première à lire ce roman était de partir à la rencontre d'un auteur italien. La quatrième de couverture le présente comme le grand écivain italien de ces cinq dernières années, pour reprendre les mots d' Alessandro Barrico. Et puis le thème abordé, proche de "La Route" de Cormac Mc Carthy, me séduisait beaucoup.

    L'histoire c'est celle de Leonardo, intellectuel, écrivain et professeur à l'université,fuyant son pays dévasté. Parti chercher de l’huile d’olive, de retour à son hôtel, il s’aperçoit qu’un individu est en train de forcer le coffre de sa voiture. Puis survient une histoire de meutes de chiens… Dès la première scène, les éléments d’un monde étrange se mettent en place, un monde violent.

    La barbarie pullule dans le pays, on ne dispose que de très peu d'éléments sur l'espace-temps de la narration. Alors, on avance fébrilement dans l'histoire de Leonardo. Cet homme vit reclus à la campagne, au milieu des livres. Il relit avec plaisir "Un Coeur simple" de Flaubert et cite régulièrement de grands auteurs, des poètes également. Je pense notamment à Anna de Noailles ( "Poème XXXIII, L'Honneur de souffrir" )citée dans la cinquième partie du roman.

    Ce roman est dense. La barbarie s'est répandue dans un pays en proie à la menace de ceux qu’on appelle les "extérieurs ". Les habitants ont peur et ils prennent les armes. La maison de Leonardo est pillée, il décide de prendre la route, l'exil vers la Suisse ou la France semble la seule issue possible.

    L'incertitude plane au fil des pages. Roman d’anticipation? Métaphore de la société actuelle?

    "Les pensées se bousculaient dans sa tête. Des pensées qui tournaient autour de la mort, de l'indignité, du courage et de la possibilité de forcer sa propre nature. Ce n'étaient pas des pensées dont il espèrait tirer le moindre soulagement, mais il savait qu'il devait les affronter.[...]Il tenta d'accrocher à ce clou fragile le tableau de sa vie, dont il n'avait jamais autant perçu l'indigence et la torpeur."

    Les longues pages sur le déroulement de scènes violentes m'ont dérangée, je ne parvenais pas toujours à cerner leur utilité, toutefois, j'étais saisie par l'envie de connaître l'issue de ce périple mené par Leonardo et les enfants. L'apocalypse est en cours.

    L'auteur nous entraîne dans ce délitement des choses, des lois et du monde. Etrangement, le personnage principal se montre alors beaucoup plus profond, plus "vertical" en somme. Dans un pays où règne le culte de la virilité machiste, ce roman prend tout son sens. La décadence devient le sel de ce roman. Le destin de Leonardo, marqué par la rupture sentimentale suite à une sombre histoire d'adultère avec une jeune étudiante, est une jolie mise en abyme du roman. Ce texte fait écho également à la contre-utopie de Fahrenheit 451 de Bradbury lorsqu'au coeur de la barbarie on réclame la lecture.

    J'ai refermé ce roman avec beaucoup de questions sur les causes sociétales de cette fiction, sur l'intérêt d'une telle barbarie et le sens profond de cette dérive.