L'envol du héron

Katharina Hagena

Anne Carrière

  • Conseillé par
    25 août 2013

    Des thèmes magnifiquement abordés, une écriture qu’il me tarde de retrouver dans un prochain roman!

    Voilà un livre que j’attendais avec impatience car j’avais lu il n’y a pas longtemps "Le goût des pépins de pommes" de cette auteure, lecture qui avait eu du mal à démarrer mais qui s’est révélée être une jolie découverte.

    La particularité des livres de Katharina Hagena, c’est que ceux-ci tournent autour de thèmes précis, à savoir ici la disparition et le sommeil. Le souvenir et l’oubli sont également très présents comme dans son premier roman.

    L’écriture peu au premier abord être assez déroutante, avec ses longues phrases, ses longues descriptions. C’est un livre qu’il faut prendre le temps de lire (au coin d’un feu par exemple) et de ne pas hésiter à relire certaines phrases. En effet, l’auteure joue avec les mots, notamment avec toutes les significations d’un même mot et certains passages sont magnifiques. J’ai pris un certain plaisir à relire des passages plusieurs fois afin de bien m’imprégner de leur signification.

    Deux récits s’entrecroisent : celui de Marthe et celui d’Ellen. Le récit de Marthe nous est livré à travers un journal de chorale qu’elle tenait. Celle-ci notait tout ce qu’il se passait lors des séances de chorale ainsi que ses pensées sur son fils disparu, ses avis sur telle ou telle personne.
    Le récit de d’Ellen est quand à lui basé sur ses souvenirs, souvenirs qu’elle ressasse lors d’une nuit où elle n’arrive pas à dormir, ce qui est un comble pour un médecin du sommeil !!!

    Les descriptions des paysages de la campagne allemande sont très présentes et l’on se croirait presque au milieu de ces lacs et de ces champs de maïs. Les émotions et les doutes d’Ellen sont également magnifiquement retranscrites que l’on s’imagine aisément être à la place de celle-ci.

    A travers ses deux récits, nous découvrons toute une série de personnages ayant chacun leurs histoires, leurs secrets qui les hantent.
    Toutes ces brides de récits vont finir par ce regrouper à travers un dénouement que je n’ai pas vu venir.


  • Conseillé par
    22 août 2013

    Après avoir lu les deux premières pages, j’ai su que j’allais aimer ce roman ! Il s’est produit tout de suite cette alchimie étrange à définir, cette osmose où l’écriture, l’ambiance vont être synonymes de plaisir de lire (sourire aux lèvres, déconnectée du monde, reliée seulement à l’histoire).

    Ellen est somnologue, le sommeil l’a quittée et durant une nuit, elle rejoint le monde des insomniaques. Tandis que l’obscurité étend ses bras sur Hambourg, elle guette le retour d’Orla, sa fille adolescente, et revient sur son parcours. Il y a trois ans elle a quitté l’Irlande et Declan qui s’était toujours comporté comme un père envers Orla pour revenir à Grund près du vieux Rhin en Allemagne. Là où elle a grandi et là où elle s’était retrouvée seule à vingt ans quand son amant avait disparu après avoir appris sa grossesse. Sa mère Heidrun atteinte d’Alzheimer a sombré dans le sommeil artificiel du coma et son père Joachim a monté une chorale. Chanter pour faire revenir son épouse à la vie, pour la sortir des limbes. Andreas y participe, son ami d’enfance qui depuis s’est enfermé dans un mutisme et ne communique que par écrit. Il y aussi Marthe, une veuve arrivée à Grund il y a quelques années, et un ancien patient d’Ellen, Benno, qui effectue une thèse d’histoire.

    Depuis la disparition de son fils Lutz il y a dix-sept ans, Marthe est une femme brisée qui n’accepte pas qu’après sa liaison de jeunesse avec Lutz, Ellen soit de nouveau heureuse. Inconnue pour tous car elle a repris son nom de jeune fille. À la chorale, Joachim lui a demandé de tenir le cahier des répétitions. Mais en plus de ces brefs rapports, elle ajoute ses pensées. Cette ancienne professeure aimant la sémantique laisse cours à des réflexions imprégnées par la mythologie et l’observation des oiseaux. Au récit d’Ellen s’ajoute les écrits de Marthe. Ellen et Orla sont liées à Marthe sans le savoir. Andréas traque, ramasse tous les papiers où sont jetés, griffonnés des mots. Son silence est survenu après le départ d’Ellen et rien ne semble l’en éloigner.

    Katharina Hagena déroule un canevas brodé de poésie autour d’Ellen, Andréas et Marthe. L’écriture est splendide, somptueuse, et il faut souligner l’excellent travail de traduction (quand on lit les notes de Marthe, on comprend pourquoi j’insiste sur ce point).
    L’histoire s’articule autour de la mort, de la vie, de la disparition, de l’oubli avec de nombreuses références culturelles sur le sommeil. L’intrigue de dessine au fil des pages tandis que la psychologie des personnalités est creusée.
    D’Ellen symbole de la jeune femme indépendante en quête de stabilité amoureuse à Andréas qui se tait pour garder un secret, à Benno obnubilé par ses recherches, j’ai tout aimé dans ce livre !
    La mélancolie douce qui s’en dégage, le rythme mélodieux, la nature personnage à part entière, les questionnements sur la mort qui dans ce roman revêt l’habit d’une étape dans la vie…
    Suspendue au fil de l'histoire et émerveillée, j'ai souri grâce aux traits d'humour !
    Un coup de cœur entier et vibrant pour une lecture extatique !


  • Conseillé par
    20 août 2013

    L'envol du héron

    C’est une histoire de disparitions et de choses tues qui mêle plusieurs générations dans le petit village allemand de Gründ. Les chapitres alternent deux voix et si celle de Ellen, mère célibataire, me donnait envie d’aller plus loin, j’ai trouvé que celle de Marthe, mère esseulée depuis la disparition de son fils, faisait perdre du rythme au roman.
    Des regrets et de la nostalgie se dégagent des pages, une certaine langueur aussi, ce qui donne à l’ensemble un ton plutôt triste et dramatique. Mais il y a de la douceur aussi, douceur des jours passés, notamment quand Ellen se rappelle de sa mère désormais mourante. Celle-ci est le personnage qui m’a le plus plu alors que c’est à travers les mots de sa fille qu’on la découvre.
    Le sommeil (métaphore de l’oubli ?) est le fil rouge de l’histoire puisqu’Ellen raconte sa vie en une nuit entière d’insomnie – un comble pour une somnologue. Plus la nuit avance moins elle trouve le sommeil, plus on voit se dérouler sa vie.
    Le goût des pépins de pomme a l’air (je dis bien « a l’air » parce que je ne l’ai pas lu) d’être une histoire un peu en contradiction avec celle-ci : L’envol du héron évoque plutôt la grisaille, les secrets, les regrets, l’oubli et le temps qui passe et je ressors plutôt mitigée notamment à cause du rythme mou qui m’a donné à moi aussi envie de m’abandonner parfois au sommeil. Ce n’est pas un mauvais roman, il devrait trouver ses lecteurs, mais il me laisse un peu perplexe.