Les Chiens noirs de la prose
EAN13
9782021186529
Éditeur
Le Seuil
Date de publication
Collection
Fiction et Cie
Langue
français
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Les Chiens noirs de la prose

Le Seuil

Fiction et Cie

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Il est au onzieme etage, a l'angle de Columbus Avenue et de la 81e rue.
Dehors, au-dessus des arbres, vent, tourbillons, fragments dechires de journal
en vol. Dedans, les radiateurs de la chambre sont bloques, brulants, la
television est allumee en permanence, et la musique coule, vingt-quatre heures
sur vingt-quatre, dans tous les couloirs de l'hotel.

Pendant ce temps, un corps brule.

Il a lu ces mots dans un livre : "Si quelqu'un pleure pendant la cremation, le
corps brule moins vite." Il imagine ce corps en feu dans le vide. Il entend
cette musique de fleurs artificielles qu'il confond avec celle des couloirs.
Il vit ce ralenti jusqu'a l'ecoeurement. Il vomit. Il se repete cette phrase
et quelques autres dont il ne comprend pas le sens : " naitre encore ", ou
bien " je connais cet endroit ", ou bien " j'ai mange un poisson de source ".

Ce qu'il veut, c'est sortir. Descendre, sortir. Se retrouver dans la rue. Avec
les chiens. Etre chien. Apprendre a ecrire comme un chien fait son trou.

Alors il ouvre son cahier. Il apprend a ecrire en prose. Il redige un manuel
de prose.

Derriere la porte la musique continue de couler. On dirait qu'elle est dans
les murs, ou le plafond, ou le papier du mur. Il ecrit contre.


Jean-Marie Gleize


*[5e]: Cinquième
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