La cravate

Milena Michiko Flašar

Éditions de L'Olivier

  • Conseillé par
    22 octobre 2013

    Quelque part au Japon, un jeune homme Hiro s’aventure au-delà de sa chambre dans laquelle il est resté deux ans pour aller dans un parc. Assis sur un banc, il observe un homme avec son attaché-case et en cravate qui prend son déjeuner. Le lendemain et le jour suivant, il y retourne et le voit à nouveau à la même place. Si Hiro pensait qu’il s’agissait d’un homme d’affaires comme tant d’autres, l’homme passe sa journée entière au parc et s’en va à la même heure. C’est l’homme à la cravate qui en premier va nouer la conversation entre eux deux.


    Hiro est un adolescent qui s’est coupé du monde, un « Hikikomori » qui a vécu deux ans cloîtré dans sa chambre et qui ne parle plus à ses parents ou à quiconque. Il a volontairement quitté l’école portant un lourd fardeau. L’homme à la cravate lui apprend qu’il a perdu son emploi et qu’il ne l’ose pas l’avouer à sa femme. Petit à petit, Hiro et Tetsu se livrent un peu plus au fil des jours. Par fragments, par confidences. Chaque jour, Hiro attend impatiemment de revoir Tetsu le lendemain. Il puise en ce dernier sa force d’affronter le monde. Une amitié hors du commun naît entre ces deux êtres sortis de la conformité. Hiro le narrateur plonge dans ses souvenirs qu’il a longtemps calfeutrés par peur d'avoir mal.

    Il s’agit d’un de ces romans portés par une écriture délicate où l’on entre sur la pointe des pieds et qui traite de sujets graves. Le statut et la place que confère le travail dans la société, la pression sociale exercée à différents niveaux, le suicide, la perte d’un enfant mais aussi l'espoir de se relever quand on est tombé .

    Ce livre n’est pas engagé il mais nous livre de belles réflexions sur l’individu avec une humanité touchante et il s'en dégage une belle luminosité ! Un roman devenu hérisson par le nombre de post-it que j’y in inséré tant j’ai été frappée ( vous le comprendrez) par de nombreux passages !


  • 18 septembre 2013

    Un parc, quelque part au Japon. D'abord distants, deux inconnus vont partager le même banc. Le plus jeune, un Hikikomori, vient de sortir de la chambre où il vit cloîtré depuis deux ans. Il craint le monde qui l'entoure. Le plus âgé, l'homme à la cravate, a été licencié de son entreprise. Il est incapable de l'avouer à sa femme. L'ermite moderne et l'employé modèle se regardent en silence, s'apprivoisent. Un tête-à-tête quotidien s'instaure. Bribe par bribe, les deux hommes se racontent. Naît alors une belle amitié qui se mue en un hymne à la vie. Les deux protagonistes regardent le monde avec des yeux sensibles et cherchent à exister tout simplement, malgré les aléas du quotidien.


  • Conseillé par
    4 septembre 2013

    "La cravate", deux petits mots, mais qui signifient beaucoup. D'abord pour le narrateur, jeune hikokomori, qui se décide enfin à faire un pas hors de sa chambre et rencontre cet homme, cet étranger, cette "cravate" anonyme, qui vient se restaurer tous les jours sur le même banc, dans le parc où il se rend. Mais aussi pour son locuteur, la fameuse "cravate" (dont on apprend tout de même le nom au cours du récit), qui le premier, décide de se livrer à lui. Le récit, qui fait la part belle aux phrases courtes, sans verbes, parait étrangement syncopé par les pensées éparses du narrateur, qui se souvient tout d'abord des choses les plus insignifiantes et les décrit avec un souci de détails inutiles (les reliefs des divers repas, le moindre froncement de sourcils, etc.).

    Puis, subtilement, le récit prend une tournure dramatique, les révélations des deux "étrangers" se faisant plus bouleversantes, plus intimes... Les sentiments sont décrits avec beaucoup de pudeur, à pas de chat, au fur et à mesure que les deux hommes prennent confiance. C'est comme si le narrateur, enfermé depuis si longtemps, vivait au travers de cet homme simple, jusqu'à ce qu'il se rende compte que lui aussi porte des blessures en lui. Très émouvante, cette histoire ne m'a jamais paru pesante, peut-être parce que l'on sent le subtil message d'espoir que l'auteur tente de véhiculer, malgré les thématiques graves : le suicide, l'enfermement, la perte d'un enfant, l'ijime (ce phénomène d'intimidation typiquement japonais). Bref, un roman dramatique et poignant, de deux étrangers qui, arrivés à une nouvelle étape de leur vie, décident de se (dé)livrer corps et âme, peu à peu, de déposer leur fardeau, et aller de l'avant.


  • Conseillé par
    31 août 2013

    La délicatesse d'un roman japonais ...

    Narration ponctuée de nombreux retours en arrière, La Cravate possède cette grâce qu’on trouve souvent chez les auteurs japonais (l’auteur a une mère japonaise, un père autrichien et vit à Vienne).
    Un peu à la manière du haïku, l’intrigue faite de peu d’éléments se déploie et étonne son lecteur. Une certaine délicatesse s’échappe alors de la plume de Milena Michiko Flasar et permet d’aborder des thèmes lourds de conséquence pour la vie d’un homme. Le suicide, la perte du travail, le dénigrement d’autrui ponctueront ce récit sans l’alourdir : ces thèmes peindront surtout la société actuelle sans entrer dans une quelconque polémique ou recherche d’engagement social.

    "La Cravate" est davantage un roman tourné vers l’individu, ses aspirations, ses envies, ses désespoirs aussi : il s’agit avant tout d’expliciter comment un jeune homme en est arrivé là, sans le juger, mais aussi et surtout de comprendre qu’il n’existe aucune fatalité en ce bas-monde, puisque seule la mort signe la fin d’un être.

    N’aie pas honte d’être un homme doté de sentiment. Quoi que ce soit, ressens-le profondément et avec ferveur. Ressens-le encore avec un peu plus de ferveur, ressens-le encore avec un peu plus de profondeur. Ressens-le pour toi. Ressens-le pour l’autre. Et ensuite, laisse-le aller.

    Roman solaire, en somme, malgré les thèmes abordés, le lecteur ne pourra qu’être bercé en outre par des phrases elles aussi lumineuses qui fonctionneront alors comme des mantras, le libérant même d’un certain poids. Une belle leçon d’optimisme malgré tout.