2, Le retour, Connard ! T2
EAN13
9782352870326
ISBN
978-2-35287-032-6
Éditeur
Archipoche
Date de publication
Collection
Romans français
Séries
Connard ! (2)
Nombre de pages
200
Dimensions
17,8 x 11 cm
Poids
115 g
Langue
français
Code dewey
843
Fiches UNIMARC
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2, Le retour - Connard ! T2

De

Archipoche

Romans français

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La Vestale ou le roman de Pauline Viardot, Michel de Maule, 2001.

Les Fleurs de l'âge, L'Archipel, 2003.

La Samouraï, L'Archipel, 2004.

Connard !, L'Archipel, 2005 ; Archipoche, 2006.

Ce livre a paru sous le titre
Morue !
aux Éditions de l'Archipel en 2006.

Retrouvez Arièle Butaux sur
www.ariele-butaux.com

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34, rue des Bourdonnais 75001 Paris.
Et, pour le Canada, à
Édipresse Inc., 945, avenue Beaumont,
Montréal, Québec, H3N 1W3.

eISBN 978-2-3528-7517-8

Copyright © L'Archipel, 2006.

À mes deux Juliette.
À Éric, ma meilleure copine.
Au Club des morues.

1

Itinéraire

Les voitures s'extirpaient de Paris comme des colliers emmêlés, composés de milliers de bulles surchauffées et trop pleines. Des visages d'enfants collés aux vitres, des pieds d'adultes sur le tableau de bord côté passager, des sièges pour bébés, des amas d'objets comme tentatives pathétiques de reconstituer son chez-soi dans l'habitacle en attendant d'arriver dans quelque maison d'amis ou de beaux-parents. Parfois, la solitude d'un parapluie de golf sur une plage arrière ennoblissait un véhicule, évoquait un départ pour Deauville, hôtel Normandy. Florence avait alors du mal à se concentrer sur la route.

— Tu devrais passer la troisième..., suggéra Nicolas.

— Dis-le, si tu veux conduire à ma place !

— Du calme, Florence ! On ne peut plus rien dire ! Tu devrais passer la troisième !

Il n'avait pas desserré les dents depuis vingt minutes et voilà tout ce que son silence lui avait inspiré.

— Tu n'as pas envie d'y aller? Tu aurais préféré rester à la maison, bien tranquille devant la télé ?

— Si tu fais les demandes et les réponses, je ne vois pas pourquoi tu me poses la question. Tu as voulu partir en week-end, tu as tout organisé dans mon dos...

— Je t'ai fait une surprise, mais, évidemment, en bon macho, tu ne veux jamais admettre que je puisse prendre une bonne initiative.

— Maman, qu'est-ce que c'est un macho ?

Florence croisa ses bras sur le volant et y appuya son visage. Elle fantasmait depuis des semaines sur ces deux jours en Normandie, dans un charmant manoir converti en maison d'hôtes. La photo dans le guide montrait une chambre tendue de toile de Jouy et le commentaire évoquait des petits déjeuners gourmands.

Elle rêvait de feu de cheminée et de chevaux dans les prés. De câlins sous les édredons avec l'homme qui, sur le siège passager, serrait poings et mâchoire, plus Carabosse que Prince charmant.

— Maman, on arrive bientôt ?

— ...

— Dis, maman, quand est-ce qu'on arrive ?

— ...

— Maaaaaaaaaaman !

— Oh, la ferme, Lucas ! s'écria Florence.

— Bonjour l'ambiance ! ricana Adrien.

— Si vous continuez à être odieux, je fais demi-tour.

Florence crut entendre à sa droite un « Bonne idée ! », mais ne releva pas. Dans moins de trois heures, les enfants gambaderaient dans l'herbe. On leur servirait ce soir, dans de la vaisselle anglaise, de bons produits du terroir. Les embouteillages, la mauvaise humeur de Nicolas et l'impatience des enfants n'étaient que des épreuves mineures à surmonter avant d'accéder à la félicité bucolique.

Florence n'en pouvait plus des dimanches parisiens où l'on faisait semblant d'occuper une journée entière avec un petit tour au marché et une séance de cinéma. Quant au samedi, il leur coûtait une fortune car, en bons Parisiens, ils s'adonnaient au shopping sans même y penser, juste parce que les magasins étaient ouverts et qu'ils n'avaient rien de mieux à faire que d'y entrer. Ainsi ces deux jours de repos hebdomadaire les laissaient-ils toujours frustrés, épuisés, soulagés de retrouver l'animation du lundi. Était-ce les enfants, pourtant désirés, qui avaient transformé en cauchemar urbain leurs week-ends autrefois si joyeux, entre dînettes aux chandelles, dernier verre à Montmartre et tournée des copains? Leurs fils ne demandaient cependant pas grand-chose : des dessins animés à la télévision, des parties de Lego et des crêpes au goûter. Mais Florence culpabilisait si elle se contentait de satisfaire ces modestes exigences.

— Maaaaaaaaaaaman ! Neptune a vomi sur mon pantalon !

Le chiot hoquetait, en effet.

— C'est dégoûtant ! protesta Adrien.

— Je m'arrête dès que possible. Ouvrez les fenêtres, sinon nous allons tous être malades !

— Manquait plus que ça ! grogna Nicolas.

— Ne bouge pas, surtout ! le tança Florence.

— Je ne supporte pas l'odeur du vomi, tu le sais bien!

Pour le savoir, elle savait, merci ! Elle en avait changé des draps et des pyjamas lorsque les enfants étaient malades en pleine nuit, épongé des planchers tandis que, vert de dégoût, Nicolas se réfugiait dans une autre pièce. Mais elle se garda de répondre, soucieuse de ne pas laisser ce week-end tourner tout à fait au vinaigre.

Ils s'arrêtèrent à une station-service d'autoroute pour réparer les dégâts et acheter des friandises aux enfants. Florence alluma la radio. Les enfants s'appliquèrent à décorer la voiture de chips écrasées et d'emballages de bonbons. Nicolas, conscient d'avoir été odieux, s'efforçait d'entretenir une conversation avec sa femme.

— Nous sommes à cran, dit-il. Un peu de campagne nous fera peut-être du bien.

— Heureuse de te l'entendre dire ! Au fond, tu n'es jamais partant pour rien, mais si on te bouscule un peu tu n'es pas mécontent.

Nicolas se tut, songeant peut-être, comme Florence, aux premiers temps de leur amour. Une fête permanente, un bain de champagne, la vie reçue, chaque matin, comme un cadeau. Il s'appliquait alors à lui plaire, confondait son rôle de fiancé avec celui d'amuseur professionnel, prenait mille initiatives pour lui faire oublier jusqu'au goût de ses dix années de mariage avec un autre, dix années d'ennui tranquille qu'elle avait pris pour du bonheur.

— Les enfants, ne donnez pas de coups de pied dans les portières !

— On n'a rien fait, maman !

— Alors les vélos doivent être mal accrochés.

— Je vais vérifier, c'est plus prudent. Arrête-toi, chérie !

Qu'il était doux, autrefois, ce « chérie », prononcé avec la tendre délicatesse d'un amoureux qui se demandait encore s'il était autorisé à l'employer ! Nicolas l'utilisait à présent comme un second prénom ou, pis, un titre de propriété. « Chérie » comme « Ma femme », « Mon épouse ».

L'arrimage des vélos vérifié, il fallut réorganiser la banquette arrière. Comme toujours, ils avaient pris trop de bagages et les enfants se plaignaient de ne pouvoir déplier leurs jambes.

— On devrait acheter un monospace, soupira Florence. On aurait de la place et je crois qu'il y a certains modèles avec consoles de jeu à l'arrière pour occuper les enfants. C'est idéal, lorsqu'on a une famille.

— Une famille nombreuse, précisa Nicolas. Ce qui n'est pas notre cas. Oui, je sais, tu nous verrais bien avec un troisième...

— Je déteste quand tu dis « un troisième » tout court. Tu pourrais dire un troisième enfant, ou un troisième bébé. Un troisième, cela me fait penser à ces bonnes femmes insupportables à la sortie de l'école Sainte-Agathe...

— Qui ont toutes un monospace ! Une cathomobile pour famille chrétienne bien-pensante.

— N'empêche que je te trouve égoïste de décider tout seul que nous n'aurons ni troisième enfant, ni monospace.

— Je n'ai pas dit cela, Florence. Mais chaque chose en son temps.

L'autoroute était chargée. Il leur fallut choisir entre les fenêtres ouvertes sur les gaz d'échappement ou les fenêtres fermées sur des relents de nausée canine. Ils optèrent pour l'alternance.

Florence se souvenait d'un autre week-end, un cadeau d'anniversaire qui avait fait date mais, hélas ! pas école.

— Fais ta valise, je t'enlève deux jours !

À l'époque, elle savait encore voyager léger. D'ailleurs, Nicolas disait qu'un rien l'habillait. Elle avait découvert leur destination au dernier moment, dans le hall d'embarquement. Venise ! Presque une lune de miel. Un bateau-taxi était venu les chercher à l'aéroport. La remontée du Grand Canal avait ressemblé à un long baiser en cinémascope, interrompu par l'émotion de découvrir leur lieu de séjour : le palazzo Gritti. Nicolas ne s'était pas moqué d'...
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